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Les Nations unies sont incapables d’assurer la paix du monde

10 Déc

Les Nations unies sont incapables d’assurer la paix du monde

par Fweley Diangitukwa (extrait d’un livre à paraître en 2018)

Les Américains et les Britanniques ne doivent pas être fiers de ce qu’ils ont fait en Irak même s’ils ont réussi à tuer Saddam Hussein par pendaison publique, de la même façon, les Français ne doivent pas être fiers de ce qu’ils ont fait en Côte d’Ivoire même s’ils ont réussi à envoyer Laurent Gbagbo à la CPI et de ce qu’ils ont fait en Libye même s’ils ont réussi à humilier et à tuer Kadhafi. La guerre n’a jamais été une solution. Elle ne l’est pas et elle ne le sera jamais.

Quelle est donc la bonne solution pour sortir le monde de la guerre perpétuelle ? Pour répondre à cette question, il faut d’abord se demander : quel a été le rôle de l’ONU dans l’éclatement de l’ex-Yougoslavie ? Au Kosovo, la transformation de la province en protectorat de l’ONU, dépendant du financement international, constitue-t-elle vraiment un modèle de règlement pour les tensions interethniques qui peut être transféré ailleurs ?

Tzvetan Todorov écrit : « De nombreux Afghans hier, Irakiens aujourd’hui, à l’intérieur comme à l’extérieur du pays, ont souhaité une intervention étrangère pour chasser les détenteurs détestés du pouvoir. Mais étaient-ils prêts à assumer toutes les conséquences de leur geste ? Imaginons-les devenus, demain, les dirigeants d’un nouveau gouvernement : accepteront-ils que le destin de leur pays soit décidé ailleurs que chez eux ? Que les puissances étrangères les déposent quand leur politique cesse de leur plaire ? Autrement dit, sont-ils prêts à se soumettre demain à une règle qui les lèse – cette même règle qui, aujourd’hui, tourne à leur avantage ?[1] » Le même Tzvetan Todorov précise :

« Nombreux sont les massacres que l’ONU n’a pas su ou voulu empêcher : génocides au Cambodge et au Rwanda [aussi en RD Congo, c’est nous qui ajoutons], tueries massives au Soudan et en Éthiopie, guerres civiles en Angola et en Sierra Leone […] Les raisons ponctuelles sont diverses, mais leur origine est commune : l’inefficacité d’une organisation qui ne dispose pas d’une force propre, mais doit emprunter celle des pays particuliers. À quoi s’ajoute la lourdeur inévitable d’une machine bureaucratique lointaine et les divergences d’intérêts des pays membres, toujours prêts à lui mettre des bâtons dans les roues[2]. »

Dans beaucoup de situations, les Nations unies se soumettent aux décisions des États-Unis et, en le faisant, elles montrent son degré de servilité. Et lorsqu’il arrive que les Nations unies expriment leur indépendance, les États-Unis quittent tout simplement l’Organisation qui les dérange, comme ils viennent de le faire en ce mois d’octobre 2017 en quittant l’UNESCO[3]. Élève fidèle, Israël a suivi la décision américaine en quittant aussi l’UNESCO. Ceci montre clairement que les Nations unies ne sont pas indépendantes mais dépendantes des grandes puissances qui financent son fonctionnement. Sur ce sujet le journal français Le Figaro a écrit le 12 octobre 2017 : « Washington accuse l’institution d’être anti-israélienne. Les États-Unis ont annoncé jeudi leur retrait de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco).‘Cette décision n’a pas été prise à la légère, et reflète les inquiétudes des États-Unis concernant l’accumulation des arriérés à l’Unesco, la nécessité d’une réforme en profondeur de l’organisation, et ses partis pris anti-israéliens persistants’, a précisé le département d’État dans son communiqué. Washington avait déjà suspendu sa participation financière en 2011 après l’admission de la Palestine comme État membre. Cette nouvelle décision de retrait ne sera effective qu’au 31 décembre 2018. Washington avait déjà quitté l’Unesco entre 1984 et 2003[4]. » En guise de réponse à la démission des États-Unis de l’agence onusienne, la directrice générale de l’organisation, Irina Bokova, a regretté profondément la décision des États-Unis. Elle a dit : « L’universalité est essentielle à la mission de l’Unesco pour construire la paix et la sécurité internationales face à la haine et à la violence, par la défense des droits de l’homme et de la dignité humaine ». Elle a ajouté dans un communiqué : « C’est une perte pour la famille des Nations unies. C’est une perte pour le multilatéralisme »[5].

Le gouvernement américain garde les prisonniers politiques non pas dans les prisons de leur pays en Afghanistan ni dans des prisons américaines mais en dehors des États-Unis, à la base militaire de Guantánamo à Cuba où le respect des droits de l’homme n’ont pas la cote. Dans cette prison, selon le New York Times du 12 mars 2003, les prisonniers subissent « la privation de sommeil et de lumière, la suspension temporaire de nourriture, d’eau et de soins médicaux ». Un traitement qui n’est pas loin de la torture puisque les techniques habituelles de « pression » incluent le fait de « couvrir la tête des suspects avec des capuchons noirs pendant des heures, sans interruption, les forcer de rester debout ou agenouillés dans des positions inconfortables par grosse chaleur ou gros froid ». Un pays qui défend la démocratie doit-il agir ainsi même si le but de ces atrocités est « d’extorquer des aveux pour empêcher des attentats à venir »[6].

Il reste à réfléchir sur l’exercice du pouvoir au niveau international. À propos, Tzvetan Todorov dit : « Le pouvoir est l’expression légale de la volonté populaire. »[7] Déjà, au XVIIIe siècle, Montesquieu avait dit : « Tout pouvoir sans bornes ne saurait être légitime. » (Lettres persanes, lettre 104).

La grande rupture dans les relations internationales a commencé avec la guerre en Afghanistan et en Irak car les grandes puissances, en l’occurrence les États-Unis et la Grande-Bretagne, ont refusé de se soumettre au droit international. Tzvetan Todorov précise :

« Au moment de déclencher la guerre contre l’Irak, les États-Unis ont traité les conventions internationales avec beaucoup de désinvolture. Il faut dire que leurs intentions avaient été clairement formulées dans The National Security. On pouvait y lire en effet : ‘Bien que les États-Unis soient prêts à déployer tous les efforts pour obtenir le soutien de la communauté internationale, nous n’hésiterons pas à agir seuls, si nécessaire’. Autrement dit : la légitimité accordée par l’ONU est un camouflage – souhaitable mais non nécessaire – de la force. L’effet négatif de telles déclarations est difficile à mesurer[8]. »

La position américaine voulait tout simplement dire que le droit international est fait pour les pays faibles qui ont l’obligation de l’observer en y obéissant tandis que les grandes puissances peuvent le transgresser allègrement pour satisfaire leurs ambitions et elles agissent ainsi sans subir la moindre conséquence négative. Dans toutes les situations de guerre, l’ONU a toujours été soumise à la volonté des grandes puissances. La preuve réside dans le fait qu’aucune puissance n’a jusqu’à présent été poursuivie par les Nations unies, parce que celles qui transgressent le droit international sont membres du Conseil de sécurité. Comme les États-Unis sont le pays le plus puissant du monde, ils méprisent les autres et font souvent ce qu’ils veulent. Il faut donc penser qu’un monde unipolaire est beaucoup plus dangereux qu’un monde bipolaire[9] et un monde bipolaire est préférable à un monde multipolaire où les différents États puissants sont condamnés à une confrontation permanente pour occuper la meilleure position par rapport aux autres[10]. L’équilibre des forces entre deux superpuissances n’est-elle pas finalement préférable pour la paix du monde ? La montée de la Chine qui a la tradition de ne pas mener de guerres de conquête et de guerres préventives ni à exporter sa foi religieuse augure un avenir où l’exercice du pouvoir au niveau international sera certainement autolimité par l’équilibre des forces en présence.

On sait que le droit international n’a pas la même efficacité ni le même respect que le droit national mais, comme le disait Monsieur Villepin, le 27 mars 2003, devant l’Institut international d’études stratégiques à Londres, les « normes collectives doivent viser à contenir l’emploi de la force [car] seul le consensus et le respect du droit donnent à la force la légitimité nécessaire [oui] la force doit être mise au service du droit ».

Le même Villepin déclara, le 13 mai 2003, au journal Le Monde : « Le rôle de l’ONU est plus que jamais irremplaçable [car] les Nations unies incarnent une conscience universelle au-dessus des États » avant d’ajouter : l’ONU doit conduire « vers la constitution d’une démocratie mondiale ». Pour y parvenir, les États du monde doivent s’employer à bannir le recours à la force en le remplaçant par le recours constant au droit. L’anarchie règne dans les relations internationales parce que les Nations unies n’ont pas une force armée (neutre) supérieure aux forces armées des États membres à laquelle ils doivent se soumettre. L’anarchie règne dans les relations internationales parce que le droit international est inférieur à la puissance militaire des grandes puissances. Pour parvenir à la paix universelle qui serait supérieure à la paix des peuples, la force doit être jugulée par le droit et les pays membres doivent parvenir à abolir le « droit de veto » attribué aux cinq membres permanents parce qu’il donne des privilèges aux uns et n’en donne pas aux autres[11].

Maintenant qu’il est prouvé que les Nations unies sont incapables d’assurer la paix du monde, que doit-on faire ?

Certes, en cas de guerre d’une grande ampleur, il faut favoriser le recours à une force diplomatique, mais cette force doit agir sous l’égide des Nations unies, c’est-à-dire qu’elle doit être une force multilatérale. C’est la communauté internationale dans son ensemble qui doit être mobilisée et intervenir, pas uniquement les pays membres de l’OTAN avec le soutien d’Israël. Au final, il faut créer une armée plus puissante que les armées nationales qui agira, en cas de conflit armé, sous le contrôle des Nations unies. En plus, tout État qui violera le droit international et une résolution des Nations unies sera exclu de toutes les Organisations de l’ONU. De ce fait, un tel État ne pourra plus commercer avec les autres pays du fait de son exclusion de l’OMC. C’est en se liguant contre les États belliqueux que la paix mondiale reviendra.

Pour mettre fin au terrorisme international sous toutes ses formes et pour assurer la paix universelle, il est indispensable d’agir sur différents plans, notamment juridique, politique, militaire et économique. Mais, pour cela, il faut d’abord abolir l’actuel Conseil de Sécurité (y compris le droit de veto réservé uniquement aux seuls cinq États victorieux de la Seconde Guerre mondiale) et le remplacer par le Conseil de Sécurité de tous les États membres.

[1]Tzvetan Todorov, Le nouveau désordre mondial. Réflexions d’un Européen, Paris, éditions Robert Laffont, 2003, p. 44.

[2] Ibid., pp. 67-68.

[3] Il est important de rappeler que les États-Unis ne se soumettent jamais aux exigences que leurs adressent les Commissions internationales (mêmes si elles ont été créées par l’ONU) lorsqu’elles sont contraires à leur objectif.

[4] http://www.lefigaro.fr/international/2017/10/12/01003-20171012ARTFIG00211-les-etats-unis-se-retirent-de-l-unesco.php

[5] Ibid.

[6] Tzvetan Todorov, Le nouveau désordre mondial, op. cit., p. 50.

[7] Ibid., p. 57.

[8] Ibid., p. 58.

[9] États-Unis–Chine ou États-Unis–Russie.

[10] Cette liste reproduit les pays les plus armés dans le monde : https://www.facebook.com/1801051863514533/videos/2044803142472736/

[11] Avec le « droit de veto », l’injustice a été institutionnalisée au niveau international car les cinq membres permanents du Conseil de sécurité sont non seulement exempts des obligations pesant sur les autres mais en plus ils peuvent imposer leur veto sur toute résolution les concernant. Ceci revient à dire que la justice au niveau international n’existe pas.