Quelques semaines après les travaux, plus personne ne parle de ces concertations nationales qui ont mobilisé des centaines de Congolais. Les organisateurs voulaient gagner en temps tandis que les participants voulaient gagner un peu d’argent. Les concertations nationales ont été un marché de dupes parce que chacun y est allé avec ses propres raisons. Les plus cupides attendent maintenant la formation d’un nouveau gouvernement, qui viendra ou ne viendra pas, tout en sachant que les conditions des Congolais ne changeront pas d’un iota. Entre-temps, les prisonniers politiques (Kouthino, Diomi, et Cie) n’ont pas été libérés, les Congolais de la diaspora sont traités comme des ennemis parce qu’ils s’expriment librement sur leur pays, les firmes transnationales continuent le pillage des ressources naturelles du Congo sans que l’Etat congolais ne dise un mot ni ne les stoppe, les Rwandais entrent et sortent du Congo comme s’ils étaient chez eux, l’Etat congolais ne ferme pas la frontière à l’Est ou ne rappelle pas notre ambassadeur au Rwanda. Comment peut-on, dans de telles conditions, convaincre les Congolais et espérer construire une cohésion nationale en convoquant simplement des concertations nationales ?
Dans un pays qui respecte ses citoyens, la cohésion nationale est une affaire du Parlement car c’est dans cette Institution que se trouvent réunis tous les représentants du peuple. Il suffisait donc de préparer un cahier des charges à mettre à la disposition des députés et de leur demander ensuite d’entrer en contact avec leurs électeurs (avec un message précis) pour espérer créer les conditions d’une cohésion nationale. Cela n’a pas été fait. Il suffisait également de montrer à tous les Congolais que le pouvoir traite les uns et les autres de la même façon. Or, cela n’est pas le cas. Si les Congolais des autres provinces (surtout ceux de l’Ouest et du Centre) sont régulièrement poursuivis, arrêtés et mis en prison, le même pouvoir n’a jamais arrêté un seul Tutsi malgré les crimes odieux qu’ils commettent à l’Est de la République. Les adeptes de Bundu dia Kongo ont été massacrés comme des lapins sauvages, c’est-à-dire sa pitié, parce qu’ils ont protesté contre les fraudes électorales qui ont placé un gouverneur qu’ils ne voulaient pas à la tête de leur province et parce qu’ils protestaient contre le recours à la corruption pour acheter les voix des députés élisant ledit Gouverneur. En revanche, pour les soldats rwandais qui pillent les ressources naturelles, qui tuent les Congolais et violent les femmes à l’Est, rien de fâcheux ne leur arrive. Une fois encore, comment peut-on, dans de telles conditions, convaincre les Congolais et espérer construire une cohésion nationale en convoquant simplement des concertations nationales ? En tout cas, dans six mois ou dans une année, personne ne parlera de ces concertations nationales sinon on en parlera comme s’il s’agissait une rencontre politique sans grande importance. Ces concertations n’auront pas le statut de la Table ronde ou celui de la Conférence nationale « souveraine ». Le Trésor Public a simplement dilapidé l’argent des contribuables.
Fidèle à sa mission d’anticipation, le CLD (Le Congo en légitime défense) attire l’attention du peuple congolais sur les enjeux à venir.
Il est malsain de cocufier un peuple entier et de l’appeler ensuite au dialogue pendant que l’origine du conflit n’a pas été résolue. Voilà la situation dans laquelle se trouve notre pays.
Au CLD, nous avons toujours eu l’avantage d’anticiper. En 2011, nous avons prévenu le peuple congolais sur la capacité des membres du PPRD de réviser l’article 220 de la Constitution (la réalité nous donne raison) et nous avons initié une pétition pour exiger l’élection des Sénateurs et des Gouverneurs de provinces au suffrage universel direct, c’est-à-dire par le peuple, afin d’éviter non seulement les fraudes à ce niveau mais aussi toute forme de clientélisme. Nous n’avons pas été compris parce que nous étions trop en avance par rapport au temps. Si, aujourd’hui, nous ne prenons pas le taureau par les cornes, le Ministre de l’Intérieur et la CENI – en appliquant la loi sur la décentralisation – vont placer dans toutes les provinces du pays des gouverneurs du PPRD ou proches de ce parti présidentiel afin de conserver le pouvoir (voir le cas récent dans la province d’Equateur). Ils vont, pour cela, recourir à de nouvelles fraudes électorales.
La fraude et l’approche clientéliste se trouvent déjà dans la restructuration de la Commission électorale Nationale Indépendante (CENI) où la majorité présidentielle, foulant au pied les règles de l’indépendance de la CENI, s’est octroyée 6 sièges et a accordé 4 sièges à l’opposition et 3 à la société civile. En comptant sur l’appui de leurs clients dans la société civile et dans l’opposition, le PPRD et alliés se sont assurés le contrôle du fonctionnement de la CENI à 95 %. Faut-il, à partir de là, accepter ce que le pouvoir impose au peuple, via l’institution dirigée par l’abbé fraudeur Malu Malu ? Non, il faut sortir de cette logique qui compromet notre avenir commun.
A peine placé à la tête de la CENI, l’abbé Malu Malu a déjà signé la première ordonnance dans laquelle il a renvoyé TOUT le personnel qui a travaillé avec l’équipe précédente car il ne voudrait travailler qu’avec ceux qui vont se soumettre aux stratégies qu’il mettra en place pour d’abord séduire et amadouer les Congolais et les surprendre ensuite en 2016. Qui vivra verra.
Si le président Joseph « Kabila », qui a été directement et profondément affaibli par les fraudes électorales à ciel ouvert et à grande échelle en 2011, décide ne pas se représenter (comme en Russie il y a quelques années) ou s’il est subitement voire brutalement écarté du pouvoir, le PPRD et ses alliés vont sans état d’âme organiser de nouvelles fraudes électorales en s’appuyant sur les gouverneurs qu’ils auront entre-temps placés partout. Ils ne s’en priveront pas car les fraudes électorales leur collent à la peau depuis 2006 comme la crotte d’un chien collée à chaussure. Pour cette raison et pour la paix sociale dans le pays, le CLD invite le peuple congolais à exiger la convocation d’une nouvelle conférence nationale véritablement souveraine et l’élection des Sénateurs et des Gouverneurs (qui sont actuellement sans mandat) au suffrage universel direct. Serons-nous compris pour éviter de nouvelles crises de légitimité ? Nous le souhaitons.
Notre pays serait mieux gouverné s’il y avait au sommet de l’Etat des nationalistes compétents et de bons stratèges. Hélas, depuis son indépendance, la RDC n’a eu que des leaders par défaut, des Patriarches et des leaders de typeWinner. La présence de ce type de leaders explique le mal congolais et notre sous-développement. Il est maintenant question de promouvoir des leaders de type Chef d’équipe,Créateur ou Sage. L’expérience vécue dans les pays étrangers montre que les leaders appartenant à ce second groupe constituent une garantie pour la stabilité et le développement d’une nation.
Fweley Diangitukwa
Président du CLD (Le Congo en légitime défense)
http://www.fweley.wordpress.com
Pour les fraudes électorales de 2006 organisées par l’abbé Malu Malu, lire Fweley Diangitukwa, Les fraudes électorales. Comment on recolonise la RDC, Paris, L’Harmattan, 2007.